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Communiqués

Allocution

Notes d’allocution de M. Jean Pronovost lors de la conférence de presse du 10 janvier 2007




L’allocution prononcée prévaut 




Chers collègues commissaires : Pascale Tremblay et Mario Dumais;
Mesdames et Messieurs les journalistes;
Mesdames et Messieurs;

Bonjour,

 

Je vous remercie de votre présence. Votre intérêt est d’autant plus apprécié que cette conférence de presse est un jalon important pour la réalisation de notre mandat. Elle marque en effet le lancement de la période de consultation publique. Au cours des prochains mois, nous allons consulter très systématiquement les québécois sur les politiques publiques à mettre de l’avant pour assurer l’avenir du secteur agricole et agroalimentaire .

 

Comme nous nous y étions engagés, nous avons préparé un document de consultation. Intitulé Agriculture et agroalimentaire : choisir l’avenir, ce document, que nous rendons public aujourd’hui, comprend dix chapitres portant sur des sujets comme la production, la transformation, l’environnement, la santé, la ruralité, etc. Chacun de ces chapitres souligne des constats généralement reconnus ou fréquemment avancés et inclut des données qui illustrent des tendances. Il pose aussi un certain nombre de questions que nous soumettons à la consultation.

 

Après avoir adopté ses politiques de fonctionnement et son code d’éthique, la Commission a entrepris une série de rencontres exploratoires qui lui ont permis d’échanger avec des organisations du secteur, des ministères et des organismes gouvernementaux, des individus reconnus pour leur expertise, ainsi que de visiter des établissements agricoles et agroalimentaires. Ces rencontres ont facilité et enrichit la démarche de préparation du Document de consultation. La liste des organismes, des personnes et des lieux concernés est disponible sur le site Internet de la Commission.

 

Nous avons aussi mis en place un Comité consultatif avec lequel nous avons validé certaines analyses. Les membres de ce comité nous ont donné de précieux avis sur le contenu du Document de consultation et nous les remercions chaleureusement. Soulignons toutefois que les commissaires demeurent pleinement et seuls responsables du contenu et de la facture du document que nous vous présentons aujourd’hui. La liste des membres du comité consultatif est également disponible sur le site de la Commission.

 

Je tiens à remercier ceux et celles qui nous ont alimentés et appuyés dans ce travail préparatoire à la consultation publique. S’il y a une chose que nous pouvons affirmer dès maintenant, c’est qu’ils ont manifestement tous à cœur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire québécois. Ils ont des bonnes idées, sont prêts à partager leurs compétences, et ils ont en commun le désir de contribuer activement à la réalisation du mandat de la Commission. Cela augure très bien pour la suite des événements.

 

OBSERVATIONS

 

Le document de consultation que nous vous présentons aujourd’hui ne prétend pas à l’exhaustivité et ne veut surtout pas préjuger des résultats de la consultation, ni des recommandations qui en découleront. Notre seul objectif est d’alimenter la réflexion et de faciliter la participation la plus large possible. Il ne serait ni logique, ni opportun d’avancer dès maintenant des thèmes ou des avenues de réponse qui présumeraient des résultats des consultations régionales et provinciales. Notre objectif, aujourd’hui, est de susciter la mobilisation, d’amorcer un débat animé et ouvert. La structure du document, les termes qu’il utilise et la façon dont sont rédigées les questions veulent soutenir et appuyer cet objectif.

 

Le gouvernement du Québec nous invite à élaborer ensemble les principaux éléments d’une vision renouvelée de l’agriculture et de l’agroalimentaire. Pour y parvenir, la voie des échanges ouverts, transparents et rigoureux est non seulement la meilleure mais, à plusieurs égards, la seule possible. Dans ce contexte, le rôle des médias est fondamental. J’aimerais donc partager avec vous quelques observations qui se sont imposées à nous, au moment de rédiger le document de consultation.

 

Pour les fins de cette présentation, je regrouperai mes observations autour de trois grands thèmes :     

  • Tout d’abord, les besoins alimentaires de la population;
  • Deuxièmement, la façon dont nous comblons ces besoins; 
  • Et, finalement, le contexte social et environnemental dans lequel évolue le secteur agricole et  agroalimentaire.

Je débute par quelques observations sur les besoins alimentaires de la population. Le premier chapitre porte sur les besoins alimentaires internes et externes. On y fait remarquer que, compte tenu de la stabilité de la population et du niveau de consommation déjà atteint, le volume de la consommation alimentaire québécoise devrait normalement plafonner. Par contre, l’augmentation de l’espérance de vie et le vieillissement de la population, la diminution de la taille des ménages, l’accroissement du niveau d’éducation, la diversité culturelle et les nouvelles valeurs sociétales accéléreront la diversification des goûts et des besoins. Quant à elle, la demande alimentaire internationale croîtra rapidement, en quantité comme en qualité.

 

Le chapitre qui porte plus spécifiquement sur la santé souligne aussi les préoccupations grandissantes de la population à l’égard d’un saine alimentation et de tout ce qui touche la sécurité et l’innocuité des aliments.

 

Il est essentiel que les producteurs agricoles et les entreprises de transformation, de même que les réseaux de distribution développent une vision claire des besoins alimentaires de l’avenir et qu’ils déterminent comment ils contribueront à satisfaire ces besoins. C’est pourquoi nous sollicitons les avis sur ce sujet et, d’une façon toute particulière, les propositions sur les moyens de renforcer les liens de communication et de confiance entre les consommateurs et la chaîne de production alimentaire.

 

Ma deuxième série d’observations porte sur la production, la transformation, la distribution et le commerce extérieur; sur la façon, en quelque sorte, dont nous comblons nos besoins alimentaires.

 

Le chapitre sur la production aborde le problème des revenus agricoles en lien avec d’autres sujets comme les structures de production, les politiques agricoles, les programmes d’amélioration et de stabilisation des revenus et la gestion de l’offre. Force est de constater que dans le contexte actuel de compétition mondiale, les prix des denrées alimentaires ont tendance à stagner, voire à baisser, alors que ceux des facteurs de production augmentent. Malgré des gains substantiels de productivité, sans l’apport des programmes gouvernementaux, le revenu net agricole des fermes québécoises serait négatif. Pendant ce temps, l’endettement des entreprises agricoles augmente, ce qui les rend plus fragiles. Pourtant, la valeur des fermes monte en flèche. C’est un paradoxe dont il faut examiner toutes les dimensions. Il est permis de se demander si l’on peut continuer longtemps sur cette voie.

 

Par ailleurs, comme le rappelle le chapitre sur le commerce extérieur, le Québec compte sur les échanges interprovinciaux et internationaux pour satisfaire une bonne partie de ses besoins alimentaires. Soulignons que 45 % de ce qui est consommé en alimentation au Québec provient de l’extérieur. Notons aussi que les exportations de biens et services, dont les exportations de produits agricoles et agroalimentaires, permettent aux québécois d’aller chercher à l’extérieur des revenus dont ils ont besoin pour maintenir ou développer le niveau de vie auquel ils sont habitués.

 

On observe toutefois un certain nombre de problèmes dans le secteur de l’exportation, particulièrement dans le domaine du porc. Le taux d’augmentation de la valeur de nos exportations a diminué au cours des 3 dernières années. Les données du premier trimestre de 2006 indiquent même une diminution de la valeur des exportations de produits alimentaires. Il est essentiel de bien comprendre les facteurs conjoncturels et structurels qui causent les difficultés actuelles. Nous sollicitons les analyses et les points de vue à ce sujet.

 

Dans un contexte de compétition internationale toujours plus vive, le développement de nouveaux savoirs et l’acquisition de nouvelles compétences constituent des leviers qui nous permettent de nous affirmer. Le savoir faire et la technologie sont des vecteurs d’innovation et de productivité. C’est pourquoi nous avons consacré un chapitre à la recherche, au transfert des connaissances et à la formation des ressources humaines. Les politiques, stratégies et programmes qui soutiennent nos activités de recherche et de formation sont-ils adéquats?

 

Nous avons aussi consacré deux chapitres à la transformation et à la distribution alimentaires.

 

Si le Québec compte sur un excellent réseau d’entreprises de transformation alimentaire, dont plusieurs sont très actives sur les marchés d’exportation, il ne possède pas, pour ne donner qu’un exemple, de marques nationales ou internationales.

 

Au cours des deux dernières décennies, nous avons assisté à un phénomène de concentration et de consolidation du secteur de la distribution. L’accès aux marchés est devenu plus difficile, notamment pour les petites et les moyennes entreprises de transformation. En effet, ces dernières n’ont pas toujours la capacité de fournir les volumes requis par les grands réseaux de distribution. De plus, les centres de décision stratégique de distribution sont maintenant, pour une bonne part, situés à l’extérieur du Québec.

 

Quelles politiques et stratégies devrions-nous adopter ou privilégier pour assurer le dynamisme et le développement de nos entreprises de transformation alimentaire?

 

Mon troisième groupe d’observations porte sur le contexte physique et social dans lequel évolue le secteur agricole et agroalimentaire.

 

Parce qu’elle occupe une grande partie du territoire habité du Québec, l’agriculture a un impact déterminant sur l’environnement. L’agriculture doit aussi, pour demeurer viable, préserver les ressources qu’elle utilise. Une eau et un sol de qualité sont essentiels. Si les efforts consentis au Québec semblent bien se comparer à ceux observés ailleurs, les constatations des chercheurs font toutefois craindre que les résultats obtenus ne soient pas complètement satisfaisants, que l’équilibre nécessaire au développement durable ne soit pas encore atteint. C’est pourquoi, dans le chapitre sur l’environnement, nous invitons les participants à s’exprimer sur les stratégies et les conditions qui assureraient l’atteinte et le maintien des nécessaires équilibres entre l’environnement et l’agriculture.

 

Même si la population agricole n’est plus majoritaire en milieu rural, l’agriculture et l’agroalimentaire demeurent des actifs importants de nos régions et des communautés rurales. L’agriculture fournit au moins 10 % des emplois dans 13 des 17 régions administratives du Québec. Il faut ajouter à ces emplois ceux offerts par les entreprises de transformation et de distribution alimentaires. Il faut aussi considérer les nombreux emplois liés à l’agriculture dans les domaines qui lui sont connexes ou nécessaires, comme, par exemple, ceux des intrants agricoles, du transport, de la vente et de l’entretien de la machinerie, des services vétérinaires, des services-conseils, de la construction, du financement, des services publics. Il est vital de bien définir les conditions et les stratégies à mettre en place pour que l’agriculture et l’agroalimentaire contribuent le plus efficacement possible à la vitalité et à la pérennité des communautés rurales.

 

À l’occasion des audiences publiques régionales, nous souhaitons aussi explorer plus en profondeur certains thèmes, particulièrement névralgiques comme par exemple la relève agricole, les productions non comestibles, les projets ou solutions qui ont valeur exemplaire ou qui sont particulièrement riches de potentiel. J’y reviendrai d’ailleurs un peu plus loin quand je présenterai notre projet de tables rondes.

 

Le dernier chapitre porte sur les principaux acteurs et le rôle qu’ils jouent dans la gouverne du secteur : les gouvernements fédéral et provincial et les institutions qui en dépendent, les élus locaux, les coopératives et l’Union des producteurs agricoles. Notre analyse doit aussi de préoccuper des relations entre les acteurs et des équilibres nécessaires au bon fonctionnement du secteur. Nous sommes intéressés à connaître et à entendre les analyses et les opinions des participants à ce sujet.

 

Je m’arrête ici, sans avoir fait le tour des sujets soumis à la consultation. Évidemment, les participants pourront aussi, s’ils le souhaitent, se prononcer sur d’autres sujets que ceux couverts dans le document.

 

Comme vous le constaterez en lisant le Document de consultation, le secteur de l’agriculture et de l’agroalimentaire est beaucoup plus riche et complexe que le portrait sommaire que je viens de dresser et qui n’avait d’autre ambition que de vous mettre en appétit. Il me faut toutefois souligner que la structure qui nous a fait répartir les différents thèmes de consultation dans un certain nombre de chapitres se veut un instrument commode pour structurer les réflexions et les échanges. Elle ne doit cependant pas nous faire oublier que tous ces thèmes, tous ces sujets sont étroitement reliés et que les orientations que nous nous donnerons pour encadrer ou influencer les uns auront nécessairement des conséquences pour les autres. La réalité est souvent faite d’éléments qu’on peut difficilement dissocier autrement que par l’esprit.

 

INVITATION À PARTICIPER

 

La Commission veut examiner les problèmes comme les solutions, dans une perspective de croissance et de qualité de vie pour l’ensemble des québécois et pour ceux qui travaillent dans le secteur ou en vivent. Il faut faire ensemble des choix, en production agricole, en environnement et en développement du territoire. Il ne s’agit pas de livrer au gouvernement et aux citoyens un compendium de problèmes, mais de mettre les potentiels en évidence et de suggérer des orientations porteuses d’avenir. Les audiences que nous tiendrons bientôt à la grandeur du Québec permettront à tous ceux qui le souhaitent de s’exprimer et de participer à ces choix.

 

Les audiences régionales auront lieu de février à mai 2007. La Commission visitera 15 régions et 26 municipalités. Dans chaque région, l’horaire sera adapté en fonction du nombre de personnes et de groupes qui auront demandé à être entendus. Nous souhaitons que les gens viennent nous parler de leurs difficultés mais aussi de leurs bons coups, de leurs succès et surtout de la façon dont ils voient ou rêvent l’avenir. Avec ou sans mémoire écrit, nous invitons tous ceux qui le souhaitent, en particulier les jeunes, à nous entretenir de leurs aspirations, de leurs idées et de leurs projets.

 

Pour approfondir les thèmes à l’étude et ajouter des moments de débat à sa démarche de consultation, la Commission organisera 7 tables rondes. À Victoriaville, la table ronde portera sur la qualité de vie des familles agricoles; à Saint-Hyacinthe, nous discuterons des productions non alimentaires comme les bioénergies, les fibres et les médicaments; à Rimouski, des nouvelles façons de s’établir en agriculture; à Joliette; de l’environnement; à Sherbrooke, des caractéristiques de la nouvelle ruralité; à Alma, de la contribution de l’agriculture au dynamisme des régions. En juin, à Montréal, nous compléterons les tables rondes sur le thème du dialogue à construire entre les consommateurs et le secteur agricole et agroalimentaire.

 

Pour mieux accommoder les participants dont le champ d’action est provincial, la Commission organisera aussi deux séances d’audiences publiques qui se tiendront à Québec et à Montréal en juin 2007. Les personnes et les groupes qui y participeront auront d’abord fait l’objet d’une invitation de la Commission. Les mémoires traitant principalement d’agriculture seront entendus à Québec. Ceux qui aborderont les thématiques liées à la transformation et à la consommation seront entendus à Montréal. Ces audiences seront précédées ou suivies d’audiences « grand public » où les personnes et groupes qui le souhaitent pourront se présenter sans invitation.

 

Nous avons conçu le site Internet de la Commission non simplement comme un canal d’information, mais aussi comme un outil pour faciliter la participation. Il sera possible, entre autres, d’y suivre en direct le déroulement des audiences publiques et des tables rondes. Les fichiers en format audio demeureront disponibles et pourront être écoutés en différé. Une section du site est réservée à la diffusion des avis et des commentaires du public. Des données et des documents sont déjà disponibles pour consultation en ligne. Ceux et celles qui préparent un mémoire sont invités à utiliser ces documents dont le nombre et la variété augmentent de jour en jour. Tous les documents et mémoires déposés à la Commission peuvent être consultés en ligne. Il est finalement aussi possible de s’abonner à une infolettre.

 

Nous ferons un effort délibéré pour examiner toutes les dimensions des problèmes traités et recueillir systématiquement les différents points de vue. Nous favoriserons le dialogue, la conciliation des points de vue, l’équilibre des solutions, l’articulation de consensus viables. La commission invite tous les participants, tous les intéressés, tous les québécois, à miser délibérément sur une réflexion en profondeur et des choix équilibrés. Il faut tout mettre en œuvre pour que la sagesse et le simple bon sens de nos choix en fassent des incontournables sur lesquels les gouvernements devront asseoir leurs politiques. À ce sujet, j’aimerais préciser que, bien que nous ayons reçu notre mandat du gouvernement du Québec, les politiques fédérales sur des sujets comme la gestion de l’offre, les ententes internationales, la traçabilité des aliments sont déterminantes. La Commission ne s’interdira pas de faire des recommandations qui toucheraient des responsabilités assumées par le gouvernement fédéral.

 

Comme son nom l’exprime bien, la Commission sur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire québécois n’a pas été créée pour le court terme, mais plutôt pour dessiner une vision du long terme. L’avenir n’est pas écrit à l’avance. Il est ce que l’on choisit d’en faire. Il dépend des choix que l’on pose après avoir bien disséqué, compris et décrit la réalité, les opportunités comme les menaces. Les gouvernements ne peuvent ignorer une vision claire et partagée.

 

Les québécois sont reconnus pour leur capacité créative et leur sens de l’innovation. Même si la société québécoise n’a aucune tradition dans le domaine, des gens parmi nous ont trouvé l’élan et le savoir-faire pour créer le Cirque du Soleil et s’imposer comme des leaders mondiaux. Je ne vois pas pourquoi en agroalimentaire, un domaine qui est ancré dans nos traditions de société les plus profondes, nous ne trouverions pas ensemble les idées et les ressources qui nous permettront d’entretenir et de développer une effervescence créative dont les participants aux travaux de la commission nous montreront, sans doute, les exemples les plus éloquents. J’invite tous ceux et celles qui ont à cœur l’avenir de l’agriculture et de l’agroalimentaire à dessiner cet avenir avec nous.  

 

Je demanderais maintenant à mes collègues commissaires de souligner certains éléments de ces perspectives d’ensemble auxquels nous attachons une importance particulière. Je me tiendrai ensuite à votre disposition pour une période de questions et je vous remercie de votre attention.